∞ 1. Es-tu satisfait de ta vie actuelle? Te sens-tu heureux?

Je dois avouer qu'en ce moment c'est assez mitigée. J'ai perdu ma femme et mes enfants, les personnes à qui je tiens le plus sur cette Terre... Et d'un autre côté, j'ai un travail superbe, je me plais à Seattle. Bien entendu, ce qui est arrivé à ma famille me rend triste, donc je pense que non, je ne suis pas heureux mais je suis satisfait de ma vie professionnelle. C'est déjà ça. Pour ce qui est de la vie personnelle, moins j'en parle, mieux je me porte.

∞ 2. Si tu pouvais changer un ou plusieurs éléments dans ta vie, lequel/lesquels choisirais-tu?

A votre avis ? Je ferais tout pour empêcher ce taré de me prendre ma famille. Je ferais tout pour essayer de trouver une réponse aux symptômes de la patiente, je ferais tout pour la sauver, je ferais tout autrement. Je changerai aussi d'adresse, je serais parti avec ma femme et mes enfants dès que le mari de ma patiente m'aurait menacé. Et puis, je serai arrivé plus tôt pour pouvoir sauver ma famille.

∞ 3. Aujourd'hui, on parle beaucoup de "repartir à zéro". Tu en penses quoi toi? Tu serais prêt à le faire?

Si ça pouvait ramener ma femme et mes enfants, sans aucun problème ! Repartir à zéro, c'est le rêve de toute personne qui a connu un drame dans sa vie, le rêve. Justement, c'est ça le problème, c'est que c'est un rêve, si seulement ça pouvait se faire, tout le monde serait nettement plus heureux. Dans mon cas, si je pouvais, j'agirai certainement différemment face au danger et puis, je m'impliquerai beaucoup plus dans ma vie familiale.

∞ 4. Finalement, si tu pouvais résumer ta vie en cinq mots, lesquels choisirais-tu?

Dépression, travail, insomnies, opération, néant.

6 mois auparavant, dans le bureau du psychologue Dr Wyatt, Seattle Grace-Mercy West Hospital.

DR WYATT - « Bonjour monsieur Hamilton, bienvenue au Seattle Grace-Mercy West. Cet entretien est simplement un entretien de routine que tous les nouveaux passent avant de pouvoir commencer à réellement travailler. Installez vous. Je vous laisse parler, je poserai peut être des questions à la fin.
NATHAN - « Bonjour, merci. Alors, je suis Nathan Hamilton, j'ai 34 ans, je suis née à Seattle. Je viens d'un hôpital du New-Jersey où j'ai exercé en tant que chirurgien cardiaque. J'avais une femme, deux enfants, un chien et une maison. Oui oui, je parle bien au passé, vous n'avez pas besoin de poser de questions, j'arrive aux faits. Le 13 avril dernier, un monsieur est arrivé avec sa femme en urgence qui se plaignait de douleurs dans la poitrine. J'ai fait des tas d'examens afin de savoir ce qui pouvait bien lui arriver. Je lui ai tout fait : scanner, IRM, prise de sang, radio, vraiment tout et je ne trouvais rien. J'ai même demandé à mes collègues, mes internes ont fait des heures de recherches mais l'état de cette femme empirait au fur et à mesure que les heures passaient. J'étais dépité, je n'avais aucune idée de ce qu'elle pouvait bien avoir et son mari qui n'arrêtait pas de me demander de faire quelque chose, elle était sous morphine, on ne pouvait rien faire de plus tant que l'origine de ces douleurs n'était pas trouvée. Je peux vous dire qu'on a cherché pendant longtemps, très longtemps même. La femme a fait un arrêt cardiaque mais j'ai pu la réanimer sans problème, son mari devenait de plus en plus fou à ses côtés, limite il était violent, un de mes internes lui a gentiment demandé d'attendre dans la salle d'attente le temps qu'on trouve une solution. Finalement, je me suis posé en salle de garde pour réfléchir au calme et j'étais persuadé d'avoir trouvé quelque chose, je suis donc allé auprès de cette dame, son mari était de retour dans la chambre, nous avons discuté quelques instants, elle était encore plus faible que quand elle était arrivée et là, sans prévenir, elle a fait un arrêt cardiaque. J'ai fait tout ce que j'ai pu pour la réanimer, vraiment tout mais rien n'a marché. Rien. Son mari hurlait à mes côtés, me traitant d'assassin, que j'avais tué sa femme, que j'allais le payer, qu'il allait me traîner en justice moi et l'hôpital et que je n'avais pas fini d'entendre parler de lui... Et ce fut effectivement le cas. Quelques jours après, le conseil m'a convoqué, il me poursuivait en justice pour homicide volontaire. Le procès a duré environ un mois mais j'ai gagné, j'ai tout expliqué au tribunal et ils m'ont dit que j'avais fait tout ce que je pouvais, j'ai également eu le soutien du chef de l'hôpital. Le mari de cette femme était dans une rage folle, c'était effrayant à voir et pourtant il m'en faut beaucoup. Vous devez vous demandez pourquoi je vous raconte tout ça mais il y a une raison, et c'est en rapport avec ma femme et mes enfants. Après cet épisode au tribunal, j'étais dans un état pitoyable, ma femme s'inquiétait énormément mais j'ai réussi à faire face à tout ça et finalement, j'ai remonté la pente. Cependant, je savais que ce n'était pas fini, le mari de ma patiente m'avait dit que j'allais encore entendre parler de lui même après le procès. Et en effet, il s'est vengé... Un jour, j'avais un très mauvais pressentiment, vous savez, le genre de pressentiment où vous savez qu'il va se passer quelque chose. Toujours avec cet état d'inquiétude, je suis rentré chez moi après mon boulot et j'ai vu, juste devant ma maison des camions de pompiers, des policiers et les ambulances, ma maison était en train de finir de brûler. Je n'en croyais pas mes yeux, quand les pompiers sont sortis avec trois brancards sur lesquels il y avait des sacs gris, je me suis dit que c'était fini pour moi. Vraiment fini, je venais de tout perdre. Ma femme, mes deux magnifiques petits enfants, le seul survivant de cet incendie est mon chien que j'ai toujours d'ailleurs mais jamais il ne pourra remplacer l'amour de ma femme et de mes enfants. J'ai appris quelques jours après que l'auteur de cet incendie était le mari de ma patiente qui a été arrêté, jugé et envoyé dans un hôpital psychiatrique. Je ne l'ai jamais revu et je crois que c'est une bonne chose, j'aurai été capable de le tuer à mains nues je pense. Enfin bref. Après ça, j'ai démissionné de mon travail, j'ai quitté le New-Jersey et je suis revenu ici, là où je suis né. Je suis resté l'espace de deux mois chez mes parents puis, j'ai cherché du travail et j'ai eu cette offre d'emploi au sein du Seattle Grace-Mercy West Hospital. Offre que je ne pouvais pas refuser, j'ai ensuite pris un appartement seul, je vis uniquement avec mon chien et voilà mon récit. »
DR WYATT - « Très bien monsieur Hamilton. Si vous voulez bien me revoir d'ici quelques mois. »

3 mois auparavant, dans le bureau du psychologue Dr Wyatt, Seattle Grace-Mercy West Hospital

DR WYATT - « Bonjour Nathan, comment allez vous ? Installez vous, alors, ces trois premiers mois ? »
NATHAN - « Bonjour. Je vais bien merci. Alors, ces trois premiers mois ? Je dois vous avouer que c'est moins pire que ce que j'imaginais. L'hôpital est nettement plus grand que celui dans lequel je travaillais dans le New-Jersey mais ça va, je me suis repérée assez rapidement et puis, les gens sont gentils ici. Certes j'ai toujours quelques différents avec certaines personnes mais que voulez vous ? On ne peut pas plaire à tout le monde ! Mais sinon, j'aime réellement mon travail, j'ai toujours peur de faire des erreurs comme celle à mon ancien travail mais ici, avec toute l'aide que l'on peut avoir, je n'ai pas forcément de soucis à me faire. »
DR WYATT - « Très bien alors si tout va bien. Bonne journée à vous. »

2 jours auparavant, dans le bureau du psychologue Dr Wyatt, Seattle Grace-Mercy West Hospital

NATHAN - « Désolé de débarquer comme ça mais j'ai besoin de vous parler de toute urgence... »
DR WYATT - « Pas de problème, allez y Nathan. »
NATHAN - « Des grands brûlés. Des grands brûlés sont arrivés aux urgences, incendie dans un hôtel, je peux pas. Vous comprenez ? Je peux tout faire, soigner n'importe qui mais les grands brûlés, c'est hors de mes moyens. Je sais qu'ils n'ont aucun rapport avec la cardiologie mais c'est tellement la folie qu'on a tous été appelés, je peux pas. Je ne peux pas, j'y arriverai pas ! »
DR WYATT - « Alors n'y allez pas. C'est tout ce que je peux vous dire. »