∞ 1. Es-tu satisfait de ta vie actuelle? Te sens-tu heureux?

Oui, j'aime beaucoup ma vie Je vis au jour le jour, je vais ou j'ai envie d'aller. Ce genre de vie me plait beaucoup. Et qui plus est, je fais le métier que j'aime, et c'est vraiment gratifiant pour moi d'être arrivée jusque là. Je fais en sorte d'aider les gens partout ou je passe. Et je m'amuse beaucoup. Alors oui, je suis vraiment heureuse avec la vie que je mène.

∞ 2. Si tu pouvais changer un ou plusieurs éléments dans ta vie, lequel/lesquels choisirais-tu?
Je crois que j'essaierais de faire un peu plus confiance aux gens. J'ai tendance à ne pas m'attacher aux personnes que je rencontre, parce que j'ai du mal à leur faire confiance. Et aussi parce que je sais que je finirais par m'en aller.
De ce fait, mes relations amoureuses n'ont jamais été très stables. Il faudrait vraiment que je travaille sur ça.

∞ 3. Aujourd'hui, on parle beaucoup de "repartir à zéro". Tu en penses quoi toi? Tu serais prêt à le faire?

Et bien, je repars à zéro à chaque fois que je déménage : nouveau pays, nouvel appartement, nouveau lieu de travail... Je ne peux pas vraiment donner d'avis objectif parce que ma vie est faite comme ça. Je sais juste qu'il faut être prêt psychologiquement à laisser tout derrière soi, à tout abandonner pour ensuite tout reconstruire. Ce n'est pas donné à tout le monde.

∞4. Finalement, si tu pouvais résumer ta vie en cinq mots, lesquels choisirais-tu?
Liberté / Voyages / Travail / Rêves / Solitude

Enfance

Je suis née à Rome, d'un père Italien et d'une mère Américaine.
Mon père était militaire, alors on déménageait souvent.
Je me souviens que petite, j'étais persuadée d'être une sorte d'Indiana Jones. Je jouais à "découvrir des ruines et des civilisations perdues". J'aimais beaucoup voyager, parce que je découvrais énormément de choses. Je sais que j'ai eu beaucoup de chance de découvrir le monde.

Quand j'avais environ 7 ans, on était au Bénin. Mes parents ont toujours insisté pour que je rencontre des gens qui vivaient dans les pays ou on était, et que je ne reste pas juste dans la base. Je me souviens que je n'arrivais pas à comprendre pourquoi je ne bronzais pas autant que les autres enfants. Je trouvais qu'ils avaient super bonne mine. C'est stupide hein ?

J'avais des tas d'amis, à cet âge là les amitiés se créent vite. Il y avait une petite fille avec qui je m'entendais vraiment très bien. C'est étrange parce qu'aujourd'hui je ne me rappelle plus son nom. On jouait ensemble toutes les après-midi.
Un jour, alors que je l'attendais à l'endroit habituel, elle n'est pas venue. J'étais fâchée, je n'arrivais pas à comprendre. Ma mère m'a dit que je devrais y retourner le lendemain, et qu'elle aurait sûrement une excuse valable. Alors le lendemain j'y suis retournée, et elle était déjà la. Elle avait l'air triste, regardait par terre, les yeux embués. Quand je lui ai demandé ce qui n'allait pas, elle m'a dit que la veille, sa mère était morte. Qu'elle était malade depuis quelques temps déjà, mais que comme ils ne pouvaient pas la soigner, elle était morte.

J'ai trouvé ça terriblement injuste. Je n'ai pas réussi à comprendre comment des gens malades pouvaient ne pas pouvoir se soigner. Parce que moi, quand j'étais malade, j'avais des médicaments, et ensuite j'étais guérie. Dans ma logique de petite fille, cette situation était improbable.

Depuis ce jour, à chaque voyage j'ai eu un regard différent. J'ai pu voir la souffrance et la misère des gens, la difficulté de l'accès aux soins. Beaucoup de gens mourraient de maladies qui n'auraient pas dû être fatales si elles avaient été prises à temps.
Le cancer, entre autres, était un tueur silencieux même dans les pays dits "riches".


Adolescence

J'ai toujours aimé apprendre. J'ai donc toujours aimé l'école. Mais a l'adolescence, je suis devenue une acharnée du travail. Il fallait à tous prix que j'ai les meilleures notes possibles, les meilleurs résultats pour pouvoir intégrer les meilleures facs de médecine. C'était impératif. Et quand je veux quelque chose, je fais tout pour l'obtenir.
Bien sûr, avec les déménagements, c'était difficile de suivre une scolarité normale, mais je m'accrochais le mieux possible parce que j'avais un but, et non des moindres : rendre accessible les soins à tous.
Alors évidemment, je savais que moi seule, avec mes petits bras, ne rendrait pas ça possible. Mais je voulais apporter ma pierre à l'édifice. Coûte que coûte. Pendant que mes camarades sortaient, faisaient des fêtes, moi j'avais le nez plongé dans mes bouquins. Mes parents étaient fiers et inquiets à la fois. Ils avaient peur que je passe à côté de ma jeunesse. Mais moi, je m'en foutais de ça. Du coup, au collège et au lycée j'ai toujours été "l'intello bizarre". Qu'importe. Je savais qu'ils ne diraient plus ça le jour ou je leur annoncerais que je pouvais soigner leur cancer, car il était pris à temps.

Hors de question de perdre mon temps à me saouler la gueule à la vodka et au whisky. J'avais un avenir à construire

Âge adulte

Entrée à la fac de médecine. Enfin.
Que de sacrifices pour y arriver. Mes histoires d'amour ont souvent été chaotiques, et pour cause : je ne leur accorde que l'intérêt minimum. Je fais partie de ces femmes qui privilégient leur carrière. Peut-être est-ce une erreur. Honnêtement je ne pense pas. J'ai gardé une âme d'Indiana Jones, je voyage toujours partout. Alors avoir une vraie histoire d'amour serait impossible. Autant mettre ça de côté.

Bien sûr j'ai déjà été amoureuse. Mais cela n'a pas marché parce qu'il ne comprenait pas que je fasse autant pour mes études et ma future carrière. Mais qui peut le blâmer ? Un bourreau de travail est loin d'être excitant et sympathique à vivre.

Mon internat a été compliqué, mais très instructif. Je l'ai fait entre Paris et Los Angeles. Voila pourquoi il a été compliqué. Et quand on débarque d'ailleurs, les résidents et les titulaires ne vous aiment pas : vous êtes instable pour eux, et vous n'arriverez jamais à tenir une carrière. Il a donc fallu que je fasse deux fois plus mes preuves. Mais c'était gratifiant. J'en ai pris plein la gueule comme on dit, mais ça m'a forgée. Je suis un meilleur médecin que je ne l'aurais été si on m'avait tout servi sur un plateau.

Maintenant j'arrive au Seattle Grace en tant que résident, et j'espère que tout va bien se passer. En un mois, je ne me suis pas trop faite remarquer. Je me contente de faire mon job. On verra ce que cet hôpital me réserve.